Cher journal,
Cette histoire aurait pu débuter comme les paroles d’une chanson de Daniel Guichard,
« Dans son vieux par-dessus râpé … »
Je la regardais descendre la ruelle étroite, fraichement goudronnée, le cou enfoncé dans les épaules dans un vêtement de pluie de couleur noir laissant apparaitre sa chevelure grisonnante. Elle courbait la tête en guise d’abandon à la tristesse et pour se protéger de la brise humide de cette fin d’après-midi. La fatalité s’était emparée de son destin, et elle subissait maintenant sa nouvelle loi en outre, elle savait désormais qu’elle ne serait plus la même aux yeux du monde et que cette nouvelle étape de vie lui ferait abandonner beaucoup de chose de son passé. L’image qu’elle s’était construite d’elle-même s’effondrait, et ce nouveau reflet qu’elle avait ignoré jusqu’à aujourd’hui la tourmentait par ailleurs, elle ne se reconnaissait plus devant son miroir. Son existence n’était pas parfaite cependant elle s’était imaginé être à l’abri dans cette petite cité ouvrière, elle pensait même qu’elle avait la force pour repousser les limites de l’impossible, mais voilà, que le ciel sans crier gare, en avait décidé autrement et la brèche dans sa chair faisait naître sa sensibilité extrême. Dorénavant, elle devait apprendre à arpenter les rues de cette petite bourgade avec ses longues jambes essoufflées et sans aucun bouclier pour la protéger. Unie pour le meilleur et pour le pire, voilà que maintenant même le pire lui manquait, sa vulnérabilité lui faisait craindre à chaque instant les jugements et les regards des autres. Les enfants devenaient adultes et s’envolaient du nid, sa féminité, éteinte par une vie sacrifiée pour héritage l’obligerait à recommencer à zéro à la recherche d’une identité ainsi qu’à l’essence de sa nature. Mais qui était-elle réellement ? Que cachait ce caractère aux allures raides qui tenaient de la force de ses sentiments et de son courage ?
Je crois bien que, ce jour-là dans l’intimité poudrée de mon bureau, elle ne se soit lâchée pour la première fois, je savais bien qu’il lui faudrait du temps mais en avait-elle suffisamment ? Je lui affirmais que oui !
Puis vint le printemps ; née à une époque où l’amour était trop pudique pour se montrer, elle avait réussi à déboutonner sa gorge et montrer ses émotions, sa chevelure avait la couleur doré des épis de blés redressés vers le soleil, ses lèvres discrètement ourlées affichaient un sourire pastel, la transformation physique avait été radicale cependant, elle n’avait toujours pas réussi à vaincre sa sensibilité, son plus grand handicap comme elle l’affirme encore aujourd’hui. Toujours suppliciée par l’agitation qui fourmille autour d’elle, elle a toutefois résistée aux épreuves, en épuisant les prières pour trouver le soulagement, et en soutenant les autres. Sa vie n’est peut-être toujours pas parfaite, son cœur mis à nu par les sépultures successives des années, appréhende toujours, avec autant d’anxiété, l’avenir mais a su faire germer la foi en de belles choses, et cette promeneuse solitaire pense qu’il est toujours possible d’offrir à ses descendants un monde dépourvu de médiocrité.
Et, maintenant que je suis loin d’elle,
En pensant à tout ça, j’me dis
« J’aim’rais bien qu’elle soit près de moi ».
MICHELLE…
MONIQUE B.
Bonjour Monique,
Je viens de lire cette belle histoire…..forte en émotions…..
Je connais ta tendresse envers les gens que tu as aidé….
Ton déménagement t’a éloigné de ces personnes…..
Mais la Pensée reste….l’éloignement n’est rien quand l’amour entre les etres est la…..présent à chaque instant….
Par télépathie…..on arrive à beaucoup de choses…….on en sait quelque chose je crois…..( rires)……
Gros bisous de nous deux…..
Jacques et Peggy